Emissions de N2O et lessivage de nitrates dans les systèmes biologiques et conventionnels

Le CNRS confirme des lessivages d'azote et des émissions de N2O plus faibles de -30% rapportés à l'hectare en systèmes de grandes cultures biologiques (versus conventionnels). Mais cet écart se réduit à 10% si les émissions sont rapportées à la production.

 

L'équipe de l'UMR Metis (CNRS) poursuit ses travaux sur la comparaison des flux d'azote dans des systèmes de grandes cultures biologiques et conventionnelles et a publié des résultats dans la revue « Agriculture, Ecosystems and Environment » en 2015.

 

Le travail a consisté à équiper pendant 3 ans une ferme située à Aulnoy dans le bassin parisien  pour suivre les flux d'azote (apportés, récoltés, lessivés et émis dans l'air). La ferme était divisée en 2 avec une rotation biologique de 8 ans comprenant luzerne, blé, seigle, lin, féverole et haricot, et des rotations conventionnelles de 4 ans (cultures intermédiaires (CI)/betterave/blé/CI/féverole/blé et blé/pois/blé/blé).

 

Au final, les parcelles biologiques ont bénéficié de 125 kgN/ha fixés par les légumineuses + 23 kgN organique importés auxquels s'ajoutent 6 kgN déposés par les pluies. Pour la rotation conventionnelle, les apports de N chimique sont de 117 kg auxquels s'ajoutent 70 kg de  N symbiotique.

 

L'azote lessivé a été estimé à 13,3 KgN/ha/an en bio versus 18,4 en conventionnel soit une baisse de 28%. La diminution des pertes de N2O est dans le même ordre de grandeur 0,65 KgN/ha/an versus 0,95 soit une baisse de 32%. Si l'on rapporte les pertes d'azote à la quantité récoltée, l'écart se resserre et la différence n'est plus que de 10%.

 

La fertilisation (total azote apporté) a été de 20% supérieure en conventionnel (193 kgN/ha) versus 154 kgN/ha en AB.  Le rendement du blé a été de 74 Qx/ha en conv. versus 40 Qx en bio.

 

Cette étude a aussi clairement montré que les émissions de N2O sont très corrélées aux apports d'azote, même si les émissions sont plus importantes pour les apports de fertilisants chimiques (ammoniac et urée) ou de fertilisants organiques très minéralisables comme les fientes de volailles.

 

Le lessivage dépend du ratio C/N. Il est faible quand le ratio C/N est élevé (supérieur à 15-20) et élevé pour les fertilisants chimiques et les apports organiques de vinasse ou de fiente de volaille.

 

Les cultures intermédiaires (à base de vesce, trèfle, phacélie et moutarde) réduisent le lessivage de l'azote surtout quand la CI est détruite au printemps.

Les légumineuses réduisent les émissions de N2O d'un facteur 3, mais celles-ci sont en partie décalées dans le temps lors d'une culture de céréale par exemple.

 

Il apparaît donc plus facile de limiter les pertes de nitrates par lessivage que les émissions de N2O qui concourent pour 30% des émissions de GES de l'agriculture.

 

Ces résultats sont confirmés par une autre étude réalisée par la même équipe et portant sur un suivi de 2 ans de 14 fermes (6 en Bio et 8 en conv) situées dans le bassin de la Seine.

Le lessivage de l'azote est réduit de 23% sur les parcelles biologiques en moyenne pour une production en TMS identique.

 

Ces deux études montrent  aussi l'importance de la luzerne dans les rotations bio.

 

Source :

  • Benoit M, Garnier J, Billen G, Tournebize J, Gréhan E, Mary B (2015). Nitrous oxide emissions and nitrate leaching in an organic and a conventional cropping system (Seine basin, France) Agriculture, Ecosystems and Environment 213 (2015) 131–141.   http://dx.doi.org/10.1016/j.agee.2015.07.030

 

  • Benoit, M., Garnier, J., Beaudoin, N., Billen, G. (2016) A network of organic and conventional crop farms in the Seine Basin (France) for evaluating environmental performance: yield and nitrate leaching. Agricultural Systems, 148: 105–113. http://dx.doi.org/10.1016/j.agsy.2016.07.005