« Moissons de savoirs » ou savoir cultiver les blés anciens : Paroles d’agriculteurs et pratiques agroécologiques en Luberon.

Sur ces terres argilo-calcaires non irrigables de Haute-Provence autour d'Apt, Manosque et Forcalquier, qui ne peuvent rivaliser en rendement avec les grandes plaines du nord de la France, des agriculteurs ont mis en place un système basé sur des variétés anciennes de céréales valorisées en farine pour une production de pain, incluant des légumineuses à graine et fourragères.

Malgré des rendements faibles (entre 15 et 30 qx), ce système, le plus souvent développé en agriculture biologique, assure un revenu à ces exploitations.

 

Le petit épeautre (Triticum monococcum), adapté aux sols pauvres et arides, provient d'une hybridation entre l'engrain et un aegilops.  Il s'agit d'un blé vêtu qui nécessite d'être décortiqué. Panifiable, il contient moins de gluten que le blé et plus assimilable. Il a obtenu une IGP en 2007 qui oblige à ne pas avoir deux céréales à paille les deux années qui précédent sa culture.

Le blé meunier d'Apt a été relancé au début des années 2000 au travers du « pain au blé meunier d'Apt ». Il est lui aussi peu sensible à la sécheresse et adapté aux sols pauvres. Il est reconnu pour sa qualité boulangère et son gluten mieux assimilé par l'organisme humain. Avec une tendance à verser, ce blé ne doit pas être cultivé derrière une légumineuse et doit être semé peu dense.

Le Florence Aurore est un blé de force (15 % de protéines) inscrit au catalogue en 1963, qui peut être semé à l'automne ou au printemps (blé alternatif). Il est particulièrement recherché pour la panification.

Les mélanges de variétés anciennes constituent une autre piste et assurent un meilleur rendement. Les farines issues de ces mélanges donnent un pain plus goûteux. Un mélange résiste mieux aux bioagresseurs que des variétés pures. Semer un mélange nécessite de bien connaître les variétés. Leurs dates de mûrissement doivent être proches.

 

Généralement, ces variétés anciennes de blé sont semées après deux ou trois ans de luzerne ou de sainfoin qui nettoient le sol et apportent de l'azote. On démarre avec une céréale exigeante puis on suit avec une céréale moins exigeante en seconde année comme le blé meunier d'Apt, le petit épeautre, de l'orge ou de l'avoine. Le sainfoin est plus adapté aux terres séchantes et résiste mieux à la sécheresse. Et il n'est pas attaqué par le phytonome contrairement à la luzerne.

 

Des légumineuses à graine peuvent être introduites aussi notamment le pois chiche (variété Twist). C'est la dernière région où l'on peut encore trouver l'ers (Vicia ervilla), une vesce annuelle qui est utilisée dans l'alimentation du bétail mais aussi comme engrais vert.

 

Les savoir-faire déployés sur ces plateaux arides concernent aussi l'implantation de luzerne et du sainfoin sous couvert de la céréale ou l'implantation de cultures intermédiaires : gesse, moutarde, vesce et avoine, phacélie, radis chinois,…. Ces semis sont soumis aux aléas climatiques et ont un coût lié aux semences. En courant le sol, ils limitent le développement des adventices et contribuent avec les légumineuses à un apport supplémentaire d'azote.

 

Des savoir-faire qui nécessitent d'être constamment renouvelés et échangés (Source : Moissons de savoirs – Magali Mir et Nathalie Charles – PNR du Luberon – 60 Place Jean Jaurès – BP 122 – 84404 Apt . Magali Amir et Nathalie Charles - 04.90.04.42.00).