Oiseaux des champs en voie d'extinction?

Les oiseaux communs de nos champs, alouette des champs, linotte mélodieuse, perdrix grise, pipit farlouse …menacés par l'intensification de l'agriculture. C'est le cri d'alarme que lancent les chercheurs du Museum National d'Histoire Naturel et du CNRS de Chizé en observant que leurs populations ont perdu un tiers de leurs effectifs en 17 ans.

Les populations d'oiseaux s'effondrent littéralement dans les plaines céréalières, et cela concerne toutes les espèces.  Ces résultats proviennent de comptages rigoureux menés depuis 30 ans à la fois au niveau national (programme STOC : Suivi Temporel des Oiseaux Communs avec environ 1000 quadrats de 4 km2 inventoriés chaque année par des ornithologues bénévoles) et au niveau local dans la plaine et val de Sèvre (450 km2) où est mené depuis 1993 un suivi intensif de la flore et de la faune à partir de 160 zones de 10 ha.

Evolution des indicateurs STOC entre 1989 et 2017 selon les milieux (source : MNHN). ce graphe montre la forte baisse des oiseaux communs spécialistes des milieux agricoles contrairement aux espèces spécialistes des forêts ou généralistes

Responsable de cet effondrement, l'intensification des pratiques agricoles au travers de l'usage des pesticides (notamment la généralisation des néonicotinoïdes), l'agrandissement de la taille des parcelles et le recul des surfaces de jachère ou de luzerne. En fait la qualité globale de l'écosystème agricole se détériore. Moins d'adventices, moins d'insectes et donc moins d'oiseaux. Mais si les oiseaux sont menacés, la production agricole l'est aussi avec un risque de voir s'amenuiser les services écologiques de pollinisation et de contrôle biologique.

On savait déjà que les populations d'outardes canepetières étaient au bord de la disparation, mais aujourd'hui la menace porte sur des oiseaux communs qui autrefois peuplaient abondamment toutes nos campagnes. Ainsi le pipit farlouse, passereau qui se nourrit d'invertébrés a perdu 68% de ses effectifs en 17 ans, tandis que la linotte mélodieuse, friande d'invertébrés en été et de graines des plantes adventices en hiver a vu disparaitre 27% de ses effectifs. Mais c'est l'alouette des champs et surtout la perdrix grise qui s'effondrent avec respectivement -50% et -90% de leurs effectifs. Cet effondrement de la perdrix grise est corroboré aussi par les travaux de l'ONCFS qui montre que dans le nord de la France l'indice de densité des perdrix est passé d'une moyenne de 100 dans les années 1990 -2010 à 60 dans les années 2013-2016 et pourrait atteindre 50 en 2017. En fait c'est l'indice de reproduction qui s'effondre en passant d'une moyenne de 3 à 6 jeunes par poule à 1,6 jeunes par poule en 2016, le plus mauvais indice observé depuis 40 ans. Même si la mauvaise météo de 2016 a joué, la tendance n'est pas bonne comme le montre aussi la décroissance continue du succès de couvées tardives.

Cette situation ne touche pas que la France, les chercheurs allemands et britaniques avaient déjà montré un déclin massif (75% à 80%) des invertébrés depuis 1990 (revue Plos One, 2017). Dans la plaine et val de Sèvre ce sont 85% des population de carabes qui ont été perdues.

Le changement du modèle agricole doit être rapide et profond si on veut inverser la tendance concluent les chercheurs. Il est plus que temps d'inverser les courbes d'utilisation de pesticides. Leur utilisation devait baisser de 50% entre 2008 et 2018, elle a en fait augmentée de 17% (Guichard L. et Al, 2017)

Sources: